En chacun de nous sommeille non seulement un Homo sapiens, mais aussi un Homo mobilis. Si l’Homme s’est longtemps satisfait de ses jambes et de la marche verticale, ses exigences ont rapidement évolué lorsqu’il s’est agi de préserver et d’étendre son espace vital. Le développement de nouvelles capacités et de nouvelles techniques – la maîtrise du feu, l’écriture, l’imprimerie pour n’en citer que quelques-unes – a notablement influencé l’évolution de l’humanité. Aussi naturelle que cette invention nous paraisse aujourd’hui, la roue a sans aucun doute été l’un des bouleversements qui ont le plus fortement contribué à faire de l’être humain l’espèce dominante et le mammifère le plus répandu sur la Terre.

La mobilité sans frontières a acquis une telle importance à nos yeux que nous sommes disposés à passer des années entières de notre vie en voiture. Et à accepter de dégrader notre environnement afin d’y implanter les infrastructures nécessaires – routes, rails, canaux, pistes d’aviation. Mais la liberté de déplacement représente un acquis auquel peu de nos contemporains sont prêts à renoncer, en dépit des dépenses énergétiques, des émissions polluantes et autres nuisances sonores.

La mobilité ne se résume cependant pas aux trajets en voiture et aux vols touristiques. Les raisons poussant à se déplacer d’un point A à un point B puis au point C sont très diverses et parfois impérieuses : sur le plan mondial, 68 millions de personnes fuient les zones de guerre et la misère ou subissent des déplacements forcés. Séparés de leur famille, les ouvriers chinois parcourent des milliers de kilomètres pour trouver un emploi. Aux États-Unis, nombreux sont ceux qui habitent dans leur voiture afin d’être suffisamment mobiles pour affronter un marché du travail des plus féroces. En Europe et en Suisse, des millions de travailleurs passent chaque jour plusieurs heures à faire la navette entre leur domicile et leur lieu de travail.

La mobilité ne se limite néanmoins pas à notre environnement, elle se joue aussi dans nos têtes, par exemple lorsqu’il faut chaque jour prendre son mal en patience dans les embouteillages : en 2017, le trafic a été immobilisé pendant plus de 25 000 heures sur les routes suisses, selon l’Office fédéral des routes (OFROU). Multiplier véhicules et voies de circulation ne mène nulle part. Il est nécessaire d’adopter de nouvelles approches et de nouveaux comportements si nous souhaitons que nos déplacements redeviennent synonymes de fluidité et de détente.

Cela vaut naturellement aussi pour le transport des marchandises qui circulent en quantités colossales d’un bout à l’autre de la planète. Dans ce domaine aussi, il est urgent que de nouvelles solutions émergent et que les comportements changent.

Cette édition d’E& met par conséquent en exergue diverses approches de la recherche énergétique grâce auxquelles une mobilité d’un autre genre pourrait faire bouger les choses. Les voitures « volantes » et les véhicules autonomes qui font depuis si longtemps rêver l’humanité pourraient même devenir réalité dans un proche avenir. En même temps, les smartphones nous mettent littéralement une solution à portée de main pour partager de nombreux trajets et réduire ainsi les dépenses énergétiques, les émissions polluantes et le bétonnage du territoire.

Autant de raisons suffisantes pour mettre en lumière le thème de la mobilité dans toute sa diversité, sans se poser en donneurs de leçon et avec une circonspection scientifique qui ne nie pas pour autant la fascination que les transports ont toujours exercée sur l’être humain. Nous espérons donner ainsi un nouvel essor à votre mobilité.